Charte de l’association

Acteurs impliqués dans la conception de produits et de situations de travail, il nous est apparu nécessaire de créer un lieu de réflexion sur cette pratique. Depuis 1995, ce lieu permet l’échange entre des personnes ayant des expériences différentes, par leur domaines d’intervention ( espace de travail, organisations de travail, dispositifs techniques ou logiciels, formations, entraînements sportifs ), leur discipline d’origine (ergonomie, informatique, sciences de l’ingénieur, gestion, sociologie, architecture, sciences et techniques des activités sportives) et leur milieu professionnel (université, cabinet conseil, entreprise, enseignement, entraînement sportif). Ce lieu rassemble des personnes qui partagent une certaine vision de la conception des situations de travail , que l’on peut résumer à travers deux formules : la conception des situations de travail doit être centrée sur la connaissance de l’activité des opérateurs ; il est nécessaire de développer des recherches scientifiques pour fonder cette conception.


Un lieu de réflexion sur les pratiques de conception des situations de travail


Ce travail de réflexion a pour objectif d’aider chaque participant à développer
ses compétences et la maîtrise de son métier. S’inspirant d’une expérience développée dans les années 50 aux Etats-Unis pour la pratique théâtrale (l’Actor’s Studio) , notre groupe est conçu comme un lieu de formation permanente des acteurs de la conception , où l’échange sur les difficultés et dépassements vécus par chacun dans ses projets constitue le moteur de la formation.

Un certain nombre de conditions doivent être réunies pour permettre ce type de travail en commun. Tout d’abord, il es nécessaire que les participants contribuent à un climat de confiance , permettant à chacun de livrer ses difficultés sans que celles-ci soient considérées comme des faiblesses. Ensuite, il est important que chacun fasse l’effort de dépasser ses préoccupations professionnelles immédiates pour prendre du recul et rendre possibles l’émergence de problématiques communes. A travers la confrontation des expériences concrètes de chaque participant, nous cherchons, à la fois à faire apparaître leur spécificité et à les situer dans une perspective d’ensemble. Ce faisant, nous construisons un cadre nous permettant de généraliser et d’enrichir nos logiques particulières d’intervention. Enfin, il est important que soit visé le développement collectif des compétences. En dehors de toute considération de carrière ou de position institutionnelle.

Nous avons souhaité créer un lieu spécifique, car les différents lieux existants où la pratique de conception ergonomique des situation de travail est discutée (congrès, séminaires, colloques) ne proposent pas de telles conditions d’échange.


Une certaine vision de la conception des situations de travail


Pour engager collectivement cette réflexion sur la pratique de conception, il nous semble nécessaire de partager un certain nombre d’idées sur la conception. La première idée est que la conception des situations de travail, qu’elle concerne une organisation du travail, un outil, une formation doit se faire en partant de la connaissance de l’activité des opérateurs : ce que nous appelons conception centrée sur l’activité des opérateurs. Aujourd’hui, les situations de travail sont encore bien souvent conçues sur les bases presque exclusivement techniques et l’activité de l’opérateur est considérée en dernier ressort. Placer l’activité des opérateurs au centre de la conception conduit à un changement de la logique et des pratiques de conception qu’il faut redéfinir. La seconde idée est que la conception nécessite d’élaborer des connaissances scientifiques sur l’activité de l’Homme au travail. En effet, pour contribuer de manière significative à la conception, il nous faut aller au-delà de la simple reconnaissance d’un besoin exprimé par les opérateurs. De même, le recours à des connaissances scientifiques élaborées sans relation avec une perspective de conception n’est pas suffisant. Nous pensons qu’une relation, dont les caractéristiques ont à définir, doit être établie entre les recherches scientifiques et les connaissances qu’elles produisent d’une part et la conception d’autre part. Nous explorons cette voie en partant de nos pratiques de conception et de recherche.


Une réflexion organisée autour de trois axes


Trois axes sous-tendent et organisent nos échanges :

Connaissance scientifique et conception : le développement d’une conception centrée sur l’activité des opérateurs introduit des exigences concernant la connaissance de l’activité. Il est par exemple nécessaire que le processus de description et d’explication de l’activité de travail soit articulé avec le processus d’élaboration des solutions. La question de la mise en forme des résultats de l’analyse de l’activité, pour permettre leur intégration dans le processus de conception est à approfondir. De même, il apparaît nécessaire d’expliciter les présupposés théoriques mis en œuvre et de les systématiser, de définir des méthodes de recueil de données et d’analyse des données, de développer des modélisations de l’activité. Enfin, nos interventions doivent souvent être réalisées à l’intérieur des contraintes de temps des projets, il est donc nécessaire de penser conjointement l’idéal vers lequel nous souhaitons tendre et les simplifications permettant de proposer des réponses rapides qui ne dénaturent pas les phénomènes étudiés.

Pratiques de conception : nous estimons nécessaire de systématiser la réflexion portant sur la définition des objets et des méthodes d’analyses et de conception, afin de préciser les principes d’une pratique de conception qui intègre la dimension ergonomique. Il est en particulier nécessaire de préciser les modalités d’élaboration des compromis qui sont opérés au cours du processus de conception. De plus, les acteurs de la conception, qu’ils soient ingénieurs, ergonomes, opérateurs, etc. ont, par leur culture et leur engagement, des points de vue et des attentes différentes. Cette diversité des points de vue des acteurs de la conception amène à poser des questions relatives aux principes de collaboration. Il s’agit d’appréhender comment la conception centrée sur l’activité transforme les pratiques et le rôle des acteurs de la conception.

Critères et indices pour apprécier et construire les améliorations : la conception centrée sur l’activité de l’opérateur part du principe que l’homme reste présent dans les situations de travail, et que l’objectif de la conception est à la fois d’améliorer la production en qualité et quantité et d’améliorer la condition de l’Homme au travail. Ayant fixé cet objectif, il apparaît nécessaire de disposer de critères et indices permettant d’apprécier la pertinence des transformations envisagées. Ces critères et indices sont bien souvent implicites dans les projets actuels. Nous proposons d’engager ce travail de définition en explorant les critères relatifs à la santé des opérateurs, leur sécurité, leur capacité d’apprentissage ainsi que ceux portant sur la qualité, la sûreté et l’efficacité productive. Il s’agit aussi d’aborder dans ce cadre, la place et les principes de l’intervention dans un champ social, notamment le statut de l’expert, celui du travail, etc.


Les modalités de fonctionnement du lieu de réflexion


Le travail est organisé à partir d’exposés portant d’une part sur des travaux et projets en cours et d’autre part sur des textes qui font référence dans le domaine. Pour favoriser la participation active de chacun, des documents sont transmis avant chaque réunion pour permettre une préparation. Pour que notre lieu de réflexion vive, il est nécessaire que chaque participant s’implique dans les discussions, les choix des lectures, la préparation des réunions. Mais notre capacité et notre plaisir à travailler ensemble dépendent aussi du climat de confiance que nous maintiendrons. Ce climat de confiance, garanti par des règles de confidentialité et de déontologie, permet à chacun d’exposer sans risque ses idées et réflexions du moment.

Le travail est organisé en sous-groupes structurés autour de quelques thèmes. Les thèmes sont définis selon les choix de chacun de façon à alimenter la problématique globale du groupe. Il peut s’agir de thèmes aussi variés que, par exemple, l’automatisation et la conception en termes d’aide, la relation entre les modélisations de l’activité et les modélisations informatiques, la prise en compte de la dimension émotionnelle dans le travail, la place des salariés et de leurs instances représentatives dans un projet de conception, etc. Il est prévu que les différents travaux soient mis en commun à l’occasion de journées d’études publiques.

Ce lieu de travail collectif doit être un lieu ouvert qui participe aux débats scientifiques, techniques et de société qui portent sur le travail et ses transformations. Il est donc indispensable que notre groupe ait une identité propre et que ses travaux soient reconnus. Ce travail collectif aura donc aussi comme finalité la production d’écrits, l’animation de séminaires et de rencontres/débats avec d’autres structures, qu’elles soient nationales ou internationales.

Association Activité et Ingénierie
2003


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